La question des transports a pris un tour inquiétant dans le débat public alors même
qu’elle se trouve aujourd’hui au coeur d’enjeux essentiels: climat et environnement,
santé publique, aménagement du territoire, enjeux sociaux et économiques.
Quasi absents de la loi sur la transition énergétique, les transports font l’objet de décisions
et de travaux pour le moins contradictoires avec l’apparence d’un consensus sur la
nécessité de rééquilibrer les parts des différents modes en faveur des plus vertueux,
singulièrement le mode ferroviaire.
Présenté comme historique, l’accord «COP21» ne donne aucune obligation aux états pour
privilégier les modes de transports les plus écologiques… ce qui les laisse libres de
poursuivre des politiques de transports qui tournent le dos aux exigences
environnementales.
La libéralisation des transports de voyageurs par autocars inclue dans la loi Macron, les
décisions visant les trains Intercités induites par le rapport de la commission Duron, les
trains express régionaux (TER) fragilisés par une concurrence routière déloyale et la baisse
des moyens aux collectivités territoriales illustrent les contradictions fortes entre les
discours sur le développement durable et les actes.
Le transport des marchandises, livré à l’hégémonie du mode routier, est totalement
abandonné à la seule volonté du marché qui ignore l’intérêt général et reporte sur la
collectivité toute entière la prise en charge des coûts qu’il génère (infrastructure, pollution,
accidents, congestion…).
Or, il s’agit là d’une grande question de société qui doit tenir une place centrale dans
le débat politique.
Réfléchir à la façon dont nous transporterons demain les personnes et les biens dans une
société où les besoins de mobilité croissent de façon importante implique une approche
multimodale équilibrée.
Redonnons au rail toute sa place : les transports ferroviaires de passagers et de
marchandises doivent redevenir de grands services publics. L’Etat et les Régions
doivent, en cohérence, assumer et développer leurs rôles d’Autorités Organisatrices
des Transports, avec les moyens nécessaires en terme de financements et de moyens
humains. La SNCF, entreprise publique, doit en être l’instrument. Elle doit être dotée
des capacités nécessaires, tant en terme d’infrastructures que d’emplois et de
compétences.
Cela implique l’accès au transport ferroviaire pour tous les citoyens aux mêmes conditions
et sur l’ensemble du réseau national modernisé et rénové.
Il est aussi urgent de développer le transport marchandise en relançant le «wagon isolé»
(traffic diffus), développant les liaisons ferroviaires avec les ports français et remettant en
place des zones logistiques reliées au fer dans les zones urbaines.
Il faut moderniser et maintenir le réseau ferré et notamment les lignes capillaires qui
assurent une desserte fine du territoire tant pour les passagers que les marchandises.
Il est nécessaire de régler la question de la dette, de mettre en place de nouveaux
financements pérennes (bénéfices autoroutiers, versement transport, contribution du
transport routier, épargne populaire, TVA à 5,5 %…), de rétablir la vérité des prix entre les
différents modes de transport en intégrant les coûts externes.
Il faut aussi impulser le développement d’une grande filière industrielle notamment dans
la conception et la fabrication du matériel roulant.
Signataires de ce manifeste, nous considérons que le mode ferroviaire garde non
seulement toute sa pertinence pour opérer le rééquilibrage entre les modes de
transports, mais qu’il est aussi un outil moderne incontournable pour atteindre le
changement de notre mode de développement et de croissance que la situation exige.
Ce principe essentiel que nous portons doit se décliner en propositions concrètes et
précises. Il y a urgence! Nous sommes à un moment critique qui impose de trouver des
réponses claires en termes de choix de société.
Avec ce manifeste nous entendons ouvrir un espace d’échanges, enrichir la réflexion
collective, intervenir dans le débat politique en organisant des initiatives publiques et
ainsi peser sur les décisions à venir.

Je suis un des premiers signataires de ce manifeste…